« Il est un jugement dont l'entendement le plus commun lui-même ne peut se défaire, lorsqu' il réfléchit sur l'existence des choses dans le monde et sur l'existence du monde lui-même. C'est que toutes les diverses créatures, quelle que puisse être la grandeur de l'art de leur organisation ou la variété du rapport qui les relie selon des fins les unes aux autres, et même l'ensemble de leurs multiples systèmes, que nous appelons incorrectement des mondes, seraient là pour rien s'il n'y avait pas des hommes (des êtres raisonnables en général). C'est-à-dire que sans les hommes, la création tout entière ne serait qu'un simple désert, inutile et sans but final.
Mais ce n'est pas non plus par rapport au pouvoir de connaître de l'homme (raison théorique) que l'existence de tout le reste dans le monde prend sa valeur, pour qu'il y ait par exemple quelqu'un qui puisse contempler le monde. Car si cette contemplation du monde ne lui permettait de se représenter rien que des choses sans but final, le fait d'être connu ne pourrait donner à l'existence du monde aucune valeur. Et il faut déjà supposer un but final du monde par rapport auquel la contemplation du monde a elle-même une valeur.
Mais ce n'est pas non plus par rapport au sentiment de plaisir et de la somme des plaisirs que nous pensons un but final de la création comme donné, car ce n'est pas le bien-être, la jouissance (qu'elle soit corporelle ou spirituelle), en un mot le bonheur, qui est le critère d'appréciation de cette valeur absolue. Car, du fait que l'homme, dans son existence, fasse pour lui-même du bonheur son intention finale, il n'y a aucun concept justifiant son existence en général, ni sa propre valeur pour qu'il se rende son existence agréable. L'homme doit donc déjà être présupposé comme but final de la création pour avoir un fondement rationnel justifiant le nécessaire accord de la nature à son bonheur, quand elle est considérée comme un tout absolu selon les principes des fins.
Ce n'est donc que la faculté de désirer, mais non pas celle qui fait dépendre l'homme de la nature (par le penchant sensible), ni celle par rapport à laquelle la valeur de son existence repose sur ce qu'il reçoit et sur ce dont il jouit, mais la valeur qu'il peut seul se donner lui-même et qui réside dans ce qu'il fait, dans sa manière de le faire et dans les principes selon lesquels il agit, non pas comme membre de la nature, mais dans la liberté de sa faculté de désirer, c'est-à-dire une bonne volonté, qui est ce par quoi son existence peut avoir une valeur absolue, et par rapport à quoi l'existence du monde peut avoir un but final.»
Il ne paraît pas contestable, en première analyse, que du point de vue de l'histoire de la philosophie, la Critique de la faculté de juger se présente comme la véritable clé de voûte du système philosophique de Kant, comme système de toute connaissance possible. On notera que la Beurteilkraft (faculté de juger) se situe du côté de l'être raisonnable en général et ne dépend pas des différents champs par rapport auxquels peut se déterminer tout jugement (Beurteilung) : elle est donc plus général que celui-ci. D'autre part, dans ses trois Critiques, et en particulier dans les deux parties de la troisième Critique, concernant respectivement l'esthétique ou jugement de goût sur l'oeuvre d'art en général, et la téléologie ou jugement vital sur la finalité de tout être en général, Kant propose, comme une nécessité, une méthodologie ou théorie transcendantale de la méthode. Par celle-ci il définit une discipline de la raison en général. Cette discipline doit se définir au sens d'un catharticon, autrement dit de la détermination du bon usage de l'organon et de ses concepts et principes, en fonction des règles définies par le canon. C'est par cette discipline seulement que la méthode peut prétendre à un usage correct, non détourné et conforme à la nature de la raison, des résultats acquis et représentés dans le corps même de la Critique de la faculté de juger.
Mais précisément, l'originalité de ce texte de Kant est de nous présenter comment la raison doit nécessairement en venir à trouver tout fondement rationnel du jugement téléologique dans la raison pratique en général. En effet, il s'agit de partir d'un enquête sur la possibilité de mettre en évidence avec certitude l'existence d'une finalité absolue du monde, en s'aidant de considérations téléologiques. Il s'agira en conséquence de préciser les différences sémantiques et conceptuelles, d'une part entre les termes de fin naturelle, de fin dernière, et de but final, d'autre part entre les termes de système, de création, de monde et de nature. Notons, comme l'a souligné Kant, qu'il ne convient pas de parler de raison pure pratique. En effet, la faculté pratique d'agir est définie comme le fait d'être, par ses représentations, cause des objets visés par les actes ainsi représentés. Dans ces conditions, la raison pratique ne saurait jamais être donnée avant les objets de son action, contrairement à la raison théorique qui peut être pure ou expérimentale. Cette remarque prendra toute son importance quand il s'agira de montrer, dans le texte, comment la faculté de désirer ne peut pas être donnée antérieurement et indépendamment de sa représentation du monde. En effet, la faculté de désirer ne peut pas désirer combler l'écart qui la sépare de son désir dans une logique du manque. Mais au contraire, une certaine représentation universelle du monde tel qu'il doit être en droit, et non tel qu'il est en fait, doit seule déterminer la faculté de désirer à se conformer à sa nature propre.
Mais en tout état de cause, on peut déjà poser le problème de savoir comment et pourquoi dans ce texte de Kant il est montré que toute la discipline de la faculté de juger téléologique doit s'appuyer rationnellement sur les fondements de la raison pratique et de la métaphysique des moeurs. Alors qu'au fond, du point de vue de l'histoire des textes et des idées, et peut-être du point de vue de Kant lui-même, la Critique de la faculté de juger est destinée à établir une équilibre entre la raison pure et la raison pratique, et donner un sens rationnel à l'énigmatique sentence de la préface aux Fondements de la métaphysique des moeurs : "J'ai du réduire le savoir pour faire une place à la croyance."
Il sera donc important de se demander de manière générale quel est le rapport rationnel entre la faculté de juger téléologique critiquée et sa méthodologie. Car Kant prétend que jamais aucune intelligence ne pourra rendre compte du pourquoi de la croissance vitale du moindre brin d'herbe. Le but final de la création serait donc irreprésentable, mais en même temps Kant tente dans ce texte, par le biais d'un rappel des acquis essentiels de la seconde Critique, de montrer au fond que la faculté de désirer peut satisfaire l'exigence de la faculté de juger téléologique. On peut donc se poser la question de savoir en quoi Kant, par ce texte éminemment singulier, assure à son système une solidité et une cohérence maximales en construisant une réciprocité complète entre les parties qui véritablement s'entre-expriment.
Ce paragraphe de Kant présente quatre parties implicites mais très nettement articulées entre elles. Dans un premier moment (de "Il est un jugement" jusqu'à "un simple désert, inutile et sans but final"), Kant se propose de montrer simplement le caractère indéniable de validité, en première approximation, de l'opinion propre au sens commun selon laquelle le monde est fait entièrement pour l'homme. Certes tout l'objet du texte sera de préciser le sens véritable de cette appropriation (sens exact du mot "pour") en écartant les contresens énumérés par Kant. Certes l'homme, en tant qu'être qualitativement et quantitativement empreint de finitude ne saurait maîtriser toutes les parties du monde, mais il peut rapporter le monde à la considération de ce qu'il imagine être l'essence finale de l'humanité. Ainsi dans le Nouveau Testament, la création n'a de sens que par l'homme. Tout comme symétriquement dans l'Ancien Testament, la création n'a de sens que pour l'homme.
Mais Kant s'empresse alors de réfuter le nombrilisme narcissique de l'homme qui succombe très facilement à l'anthropomorphisme et à sa conséquence anthropocentriste. En effet, l'homme présente une tendance irrépressible à se projeter sur ce qui est autre et ainsi, croyant se reconnaître partout, n'éprouve aucune peine à ramener tout à lui-même. La critique kantienne de cette opinion pragmatiste du sens commun (qui vise des choses directement concrètes et utiles) apparaît beaucoup plus profonde (rationnelle) que la trop superficielle critique que Voltaire propose de l'idée que le monde est fait pour l'homme : par exemple si notre nez présente une telle configuration générale, c'est parce que Dieu a pensé, note ironiquement Voltaire, que nous pourrions avoir besoin de besicles (ou bien la célèbre formule :"Dieu a fait l'homme à son image, et l'homme le lui a bien rendu").
Cependant Kant admet la justesse intuitive de cette opinion du sens commun (il doit y avoir un but final) contrairement à Spinoza qui, dans l'appendice au livre I de L'Ethique, lui oppose radicalement une fin de non recevoir sans aucune tentative d'une interprétation alternative qui pourrait sauver (justifier) cette intuition ou ce pressentiment encore obscurs. Kant va d'ailleurs tout au long de ce texte, après avoir exclu progressivement toutes les fausses explications, chercher l'explication véritable dans la notion pratique de but final moral (dignité et valeur de la personne humaine). Kant montre ainsi la naïveté de la preuve physico-théologique ou téléologique, par laquelle l'homme est trop facilement et trop hâtivement enclin à passer de l'observation d'une très grande sagesse dans l'organisation du monde (une sagesse d'architecte) à une infinie sagesse (celle du Créateur). Kant a sans doute lu les Dialogues sur la religion naturelle de Hume mais il ira plus que celui-ci en cherchant un fondement moral à la nécessité de considérer l'argument de la preuve téléologique. En effet de nombreuses objections et le manque de preuves doivent empêcher l'inférence incongrue dénoncée par Hume dans ses dialogues (position de Cléanthe dépassée par celle de Pamphile). De toute façons, comme le suggérait déjà Aristote dans son Ethique à Nicomaque, l'homme ne semble pas être ce qu'il y a de meilleur dans l'univers. On ne saurait dès lors penser que le monde soit véritablement fait pour l'homme.
Dans une seconde partie (de "Mais ce n'est pas non plus par rapport à la faculté de connaître" jusqu'à "prend une valeur"), Kant continue sa progression cathartique et méthodologique. Il épure de l'usage de la faculté de juger téléologique une deuxième tentation, qui n'est plus identique à la première, celle de l'utilitaire, du pragmatique et du commode : "Si le monde est là c'est qu'il doit bien servir à quelque chose", s'imagine-t-on couramment. Mais elle consiste à croire plutôt que, au fond, le monde est ma représentation, pour reprendre une formule schopenhauerienne. On pourrait infléchir celle-ci en disant que le monde serait fait pour que le pouvoir et la faculté de connaître puissent s'exercer librement, autrement dit conformément aux exigences de la nature de la raison. Ensuite, Kant passe à un troisième moment de sa progression méthodique : de "Mais ce n'est pas non plus en rapport au sentiment du plaisir" jusqu'à "son existence agréable". Il procède ici résolument par des éliminations de plus en plus fines, de moins en moins grossières et immédiates. Kant envisage cette fois l'hypothèse où l'homme accorderait une valeur fondamentale au monde en ce que celui-ci pourrait se prêter à la recherche constante du bonheur, comme impératif pragmatique, c'est-à-dire visant une fin réelle. En effet, comme dit Aristote au début de l'Ethique à Nicomaque tous les hommes recherchent le bonheur, mais ils ne s'entendent pas sur les modalités de cette recherche.
Enfin, dans un quatrième et ultime moment (de "L'homme doit déjà être présupposé" jusqu'à la fin du texte), Kant, après avoir épuisé dans l'ordre d'importance et de difficulté croissantes les trois hypothèses, se permet à bon droit et à juste titre, en accord avec sa propre progression méthodologique par éliminations et approximations successives, de poser comme principe de la valeur fondamentale ou du but final du monde, la faculté de désirer supérieure et ses exigences morales propres. Les trois hypothèses qu'il a successivement examinées dans le cours du texte sont les suivantes.
En premier lieu le pouvoir de connaître comme fondement du but final du monde (deuxième moment du texte).
En second lieu le sentiment de plaisir et de peine — la peine se définissant par rapport au plaisir comme son absence —, se divise en deux déterminations. D'une part la seconde hypothèse qui consiste à faire résider le fondement du but final dans la supposition du sentiment de l'utile, en d'autres termes l'impératif technique ou la règle de l'habileté (premier moment du texte). D'autre part la troisième hypothèse qui consiste à déterminer le fondement du but final du monde dans le sentiment de la recherche et du désir de bonheur, en d'autres termes la thématisation de l'impératif pragmatique ou le conseil de la prudence (troisième moment du texte). La progression du texte montre que Kant a successivement dépassé et abandonné ces trois hypothèses pour faire place au sentiment moral de la dignité, valeur infinie de la personne humaine comme être rationnel soumis à l'universalité de la loi morale comme fondement du but final du monde.
On peut donc se poser la question, à travers cette progression, cette unité et ce mouvement rigoureux du texte, de savoir quelle est la légitimité rationnelle de ce passage à la sphère pratique dans la remontée, des causes déterminant cette exigence propre, à la faculté de juger téléologique de chercher et de trouver un but final du monde, en d'autres termes la valeur fondamentale d'un sens du monde pour l'homme.
Kant montre au début du texte que l'exigence de supposer ou de présupposer un sens total, une valeur fondamentale au monde, est enracinée en tout homme de la manière la plus universelle. Si tel n'était pas le cas, cette propension universelle ne pourrait changer de plan de référence et se trouver dans la faculté de désirer supérieure. Tout homme possède en effet le pouvoir de réfléchir, c'est-à-dire trouver de l'universel à l'intérieur même du particulier. Mais cependant, dire que sans l'homme le monde n'aurait pas de sens, revient à assigner une place particulière et privilégiée à l'homme, c'est donc lui refuser le caractère universel du jugement réfléchissant propre au sensus communis. Certes, Kant ramène les trois questions fondamentales, — respectivement de la raison pure, de la raison pratique, et du sentiment religieux : Que puis-je savoir? Que dois-je faire? Que m'est-il permis d'espérer? — à la question : Qu'est-ce que l'homme? Mais cette question ne doit pas incliner l'esprit à répondre que l'homme est le centre de l'Univers, le but final et la valeur fondamentale en vue de laquelle tout être et le tout s'organisent adéquatement à la raison.
Kant parle d'un côté de "créatures" et d'un autre côté d'un "art de leur organisation". Cette ambivalence d'expression pourrait incliner à confondre l'organisation et la création. Il conviendrait d'éviter la pétition de principe, en affirmant qu'il n'existe pas d'organisateur de ces natures organisées avec tant d'art. Kant d'autre part, suivant Leibniz, prend la précaution d'éviter l'objection suivant laquelle notre monde — le monde tel qu'il soit possible que l'homme se le représente — ne serait qu'une partie, non la meilleure, d'un monde plus grand qui contiendrait la raison ultime des différents mondes qui le composent.
En réalité, il n'y a qu'un seul monde, — qu'il soit le meilleur ou non, peu importe ici —, qui est celui qu'il est possible à l'homme de se représenter quant au "but final". Il faut le distinguer de la "fin naturelle", et de la "fin dernière".
La première sorte de fin est une condition de possibilité, liée à un déterminisme et au mécanisme de la nature, de l'existence d'un objet.
La seconde sorte de fin (mentionnée à la fin du texte à propose du bonheur) est un principe d'action qui ne possède pas sa raison en lui-même. Ainsi, la notion de bonheur qui fait agir les hommes a pourtant un contenu indéterminé. Cette raison extérieure qui constitue le ressort de l'action humaine nécessiterait pour atteindre le bonheur une totalisation de la série des conditions qui déterminent cette recherche vaine et éperdue. Mais cette condition ne peut pas être remplie par un entendement fini. C'est par contre dans la notion de "but final" que Kant trouve la raison d'être du monde. Car il est un principe d'existence qui possède, contrairement aux deux autres (la "fin naturelle" et la "fin dernière") sa raison d'être en lui-même. Cette raison interne ne se tient ni dans le mécanisme infini de la nature, ni dans la totalisation idéelle de l'esprit.
Kant réfute donc un idéalisme du type de celui de Berkeley pour lequel le monde n'existe qu'en tant qu'il est pensé ("Esse est percipi aut percipere"), ou qui existe pour être représenté, selon Schopenhauer. De même dans la seconde partie du texte, Kant invalide la doctrine spinoziste de la libération de l'homme par la connaissance pure d'entendement réflexif qui saisit de l'intérieur la structure de l'idée adéquate à chaque chose. Car au fond, la connaissance du déterminisme et de la nécessité mathématique du monde demeure radicalement étrangère à toute morale.
Ce n'est pas davantage dans le sentiment du plaisir et dans le penchant sensible, qui ne possèdent jamais en eux-mêmes leur raison d'être, que la raison peut chercher le principe inconditionné qui peut rendre raison de la nécessaire exigence de la faculté de juger téléologique de trouver un but final du monde.
En effet, le bonheur au fond, pour Kant, n'est qu'un passage à la limite de la somme des plaisirs possibles et qui n'en diffère que par le degré. Kant affirme en effet, que le bonheur est le souhait de tout être raisonnable mais fini, et qu'il est de plus la satisfaction intégrale de tous nos penchants, tant extensive (quant à la variété), qu'intensive (quant au degré), et que protensive (quant à la durée). On peut remarquer par ailleurs que la faculté de juger téléologique exprime par nature l'exigence d'un accord ou d'une harmonie nécessaires entre la nature de l'homme et celle du monde. Cet accord est un principe que l'on trouve déjà sous une tout autre forme chez les Stoïciens, dans la volonté de faire coïncider la raison extérieure (cosmique) et la raison intérieure (individuelle). Il s'agit ici d'une méthode régulatrice, et bien que son déploiement ne soit pas constitutif, elle suppose et présuppose dans l'homme la possibilité de déterminer universellement le but final du monde. C'est ainsi que la nature et la création, c'est-à-dire la cause ultime de la nature et se tenant en dehors d'elle, doivent être construites et constituées dans l'esprit d'après l'idée d'un tout conformément à la structure même de la faculté de juger comme faculté des principes pratiques. Or seule la faculté de désirer supérieure peut se prévaloir du privilège d'être la cause absolue des objets visés par les actes qu'elle se représente comme conformes à sa nature, autrement dit ce qu'elle doit être. Cette faculté de désirer supérieure s'oppose à la faculté de connaître et au sentiment de plaisir et de peine. Car la faculté de connaître construit le monde scientifique tel qu'il peut se régler sur elle. La faculté d'éprouver par sentiment du plaisir et de la peine est liée à la nature et elle en dépend, même si elle n'en résulte pas essentiellement.
C'est pourquoi pour Kant la faculté de désirer demeure radicalement différente du sentiment conditionné du plaisir. Elle coïncide dès lors entièrement avec la "bonne volonté". Cette bonne volonté n'est nullement la volonté de ce qui est bon (ce serait immédiatement le plaisir pour tout être humain). Mais au contraire ce qui est bon dans la volonté, c'est l'obéissance à la loi morale, autrement dit la capacité de rendre universel tout principe d'action.
C'est pourquoi la liberté est pensée comme la ratio essendi de la loi morale. Est morale en effet une action qui reste libre de choisir entre le bien et le mal (et qui choisit la vertu). Réciproquement, la loi morale est pensée comme la ratio cognoscendi de la liberté. Car elle nous permet de saisir le sentiment de liberté, autrement inaccessible, dans et par le désir d'accomplir son devoir.
Ainsi on ne saurait déceler aucune contradiction entre la faculté de juger téléologique et la faculté de désirer. Car celle-ci apparaît en tant que désir de l'universel, autrement dit le lieu où l'universel se désire lui-même. Elle peut donc seule répondre aux exigences de totalisation et de recherche téléologique du "but final". L'homme par conséquent donne tout son sens au monde et à lui-même quand il peut dire, comme Kant à la fin de la Critique de la raison pratique : "Deux choses remplissent le coeur d'une admiration et d'une vénération toujours croissantes et toujours nouvelles, à mesure que la réflexion s'y attache et s'y applique : le Ciel étoilé au-dessus de moi et la loi morale au dedans de moi".
Christophe Steinlein (avril 1990).
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